En Europe, la voiture la plus vendue est quelque chose qui pourrait s’appeler Golf, un «hatch» à 3 ou 5 portes, juste un peu plus de 4 mètres et de la place pour 4 à 5 personnes avec quelques menus bagages. Cela dure depuis des décennies. Une voiture culte ! Aux Etats-Unis, la Golf peine à trouver des acheteurs malgré un prix 30% plus bas que chez nous. C’est quoi ce bazar me direz-vous… Oui les Ricains sont plus cools, la voiture la plus vendue est un pick-up, le Ford F150 de plus de 5 mètres de long et cela depuis des décennies, c’est leur Golf. Mais qu’ont-ils de différent pour avoir des goûts automobiles si diamétralement opposés aux nôtres. 

 

L’histoire des pick-ups…

Le pick-up aussi appelé Sport Utility Truck est né dans les années 1920 sur la base de la légendaire Ford T. C’était une sorte de camionnette avec une benne à l’arrière de la cabine fermée. En anglais, nous pouvons présenter cette definition: “A pick-up is a small truck used for light loads”. En Australie, également un pays aux grands espaces, le pick-up fait son apparition en 1932 et se nomme ute pour utility. Et le Continent Africain après avoir découvert des versions de Peugeot 403 et 404 a définitivement adapté les Toyota Hilux ou autres petits pick-ups japonais comme les Datsun maintenant rebaptisés Nissan.

 

Pick-up Ford T des années 20

 

Un multi usage low cost….

Aujourd’hui le pick-up peu avoir une cabine single ou double cab. La benne en version de base est laissée libre aux courants d’air ou pour emmener des ouvriers sur un chantier. Elle peut être recouverte avec une bâche ou un «cover», en choisissant dans la liste des options ou en « after market ». Le pick-up classique est inscrit aux States dans la catégorie des « light trucks » par opposition aux trucks ou aux véhicules appelés «heavy duty», là ce sont de vraies bêtes de plus de 4000 kg. Les pick-ups sont donc d’une conception simple avec le bon vieil essieu arrière rigide indestructible. Et pour les vrais amateurs, ils se déclinent toujours avec un bon vieux V8 qui fait des vocalises graves à la moindre pression sur l’accélérateur, c’est beau et fait plaisir à entendre, ici pas de cliquetis de diesels, c’est du brut de brut. La simplicité en automobile a assurément du bon aussi au niveau robustesse, les clients américains y sont sensibles. Question prix c’est imbattable. Pour vous donner une petite idée cela démarre à moins de 20'000 $, mais peut dépasser les 50 pour une version luxueuse avec un 6.2 litres, le cuir, et tout l’équipement nécessaire pour un aventurier des villes ! Pour une famille US, il est « cool » et très pratique de rouler en pick-up, une voiture qui peut être utilisée par un plombier la semaine pour aller sur le chantier et en week-end pour  transporter la marmaille jusqu’à la plage la plus proche et embarquer les cannes à pêche et le surfboard en vrac dans la benne. Et à 20'000 dollars rien à dire, cela fait, je vous le rappelle 15'000 Euro, alors vive l’Amérique et la liberté. Pour l’équivalent de 20'000 Euro vous avez un pick-up neuf avec un vrai V8, que demander de mieux pour le peuple, surtout qu’en entretien il n’y a presque rien à faire à part demander à son oncle d’Amérique d’installer une pompe à essence dans le jardin, ce sont des gouffres. On ne parle plus de CO2 à ce niveau !!!

 

A way of life….

Le pick-up est un réel «way of life»  de l’autre coté de l’Atlantique, et ne vous détrompez pas, le pick-up n’est pas seulement présent dans les Etats du Sud ou le soleil brille plus de 300 jours par années. Même au Nord, il est partout: en ville, à la campagne, sur les chantiers, dans les villages…alors pourquoi ce succès ? Probablement parce que les américains ne sont pas compliqués, ils sont restés de grands enfants. Alors qu’en Europe l’on aime cacher ses bagages dans le coffre de sa voiture; là-bas, un «lonely cow-boy», part avec un billet de 100$ dans sa poche de jeans. Il balance juste ses deux sacs en toile dans la benne de son pick-up pour faire une traversée de 1000 miles au volant de son véhicule, qu’il pleuve ou qu’il vente, il ne se soucie de rien, l’essentiel est d’arriver à destination et de conduire « cool ».   

 

Pick-ups en Europe…

En Europe, le pick-up essaie de refaire une percée, alors qu’il était très apprécié avec les Peugeot 404 pick-up, VW Bus T1 et T2 et autre Defender dans les années 60. Nous assistons aujourd’hui à quelques importations parallèles US et la VW Amarok et autres Nissan Navara ou même Logan regagnent quelques parts de marché. Par contre, sur le Vieux Continent, nous avons d’autres problèmes à prendre en compte lorsque nous choisissons une voiture. Tout d’abord la taille d’un pick-up, souvent dans les 5 mètres 20, est problématique pour trouver une bête place de parking. Ensuite, la consommation et, au final, le regard des voisins. En effet, cela ne fait pas très BCBG pour un gradué de Grandes Ecoles parisiennes de déambuler le coude à l’air, bras de chemise retroussée au volant d’un pick-up Silverado ou RAM 1500. Les prochaines élections communales seront perdues d’avance. Tout est question de mentalités et notre Continent n’aime pas la démesure, ni peut être l’aspect pratique d’une voiture !

 

Chevrolet Silverado

 

Le choix du contributeur…

A force d’être aux Etats-Unis, je commence même à me dire que je roulerais bien dans un pick-up. Et mon choix se porterait certainement sur une Ford des années 60, à la peinture bleue claire comme le ciel mais toute ternie et devenue matte à force de recevoir les rayons du soleil californien. A moins que ce ne soit un Chevrolet El Camino, un coupé pick-up des années 70 ou « just for fun » un Dodge avec moteur gonflé aux anabolisants par Hemi. En Europe, pas d’hésitations. Si j’habitais en Allemagne, ce serait un VW Bus T1 ou T2 version pick-up de couleur beige ou gris souris, en Italie le Fiat Strada (dérivé de la Fiat Palio). En Angleterre l’inébranlable Defender avec la calandre renfoncée comme dans les Daktari, un mix d’africanité et de « farmer » écossais, en plus d’être pick-up, il grimpe aux arbres et avale des pentes comme un dahu.  

 

L’avenir des pick-ups…

Le pick-up est un « way of life » et lorsqu’on y a gouté à ce moyen de locomotion pour si peu d’argent on ne risque pas de chercher autre chose, c’est aussi un refus d’une certaine hyper technicité qui pollue nos voitures modernes et les rendra à terme insipides. Mais attention, les constructeurs de Detroit sont en train de nous concocter des versions plus légères de quelques centaines de livres, avec une structure en aluminium, des trains arrières plus sophistiqués, etc etc….les prix vont probablement monter en parallèle à la chute de la consommation, mais est-ce bien ce que désire le peuple?  

 

Pierre-Yves Augsburger