Il y a des jours comme ça où tout vous sourit. Pour Renault c'est aujourd'hui. Le groupe qui a annoncé jeudi soir des ventes records pour le troisième trimestre 2011, n'avait pas vu son cours de Bourse monter aussi haut depuis des mois et a remporté ce vendredi le juteux appel d'offres public de voitures électriques. Dans les quatre prochaines années le constructeur devra fournir quelque 15.637 Kangoo ZE à l'Etat ainsi qu'à des entreprises aussi prestigieuses que la Poste, France Télécom, ADP ou encore GDF Suez. Heureux coup du hasard pour le constructeur, l'annonce est tombée le jour même où les fameux utilitaires font leur arrivée chez les concessionnaires....
Cela devait faire longtemps que Carlos Ghosn n'avait pas eu tant de satisfactions. Il y a quelques mois encore le constructeur était plutôt considéré comme le vilain petit canard du CAC 40. Fausse affaire d'espionnage, rumeurs de délocalisation, difficultés de management, positionnement incertain de la marque, renouvellement tardif des modèles ...les critiques pleuvaient sur la marque au losange, alors même que la stratégie de montée en gamme de son éternel PSA était louée par les analystes.
C'est peu dire que la tendance s'est inversée. Alors que PSA a lancé mercredi son deuxième avertissement sur résultat pour 2011, Renault vient de publier un chiffre d'affaires en hausse de près de 12% au troisième trimestre à 9,74 milliards d'euros, signant même le volume de ventes trimestrielles le plus important de son histoire. Tandis que PSA a dû revoir à la baisse son résultat opérationnel courant pour sa division automobile, Renault indique de son côté "que les incertitudes macro-économique n'ont pas eu à ce stade d'incidence notable sur la demande", au point qu'il peut confirmer aujourd'hui qu'il fera mieux cette année qu'en 2010. A croire que les deux constructeurs ne regardent pas la conjoncture économique mondiale avec les mêmes lunettes!
Renault mieux armé face à la crise
"En réalité, il semble que Renault soit mieux armé face à la crise que PSA, et ce pour plusieurs raison, explique Bernard Jullien, directeur du think thank Gerpisa, et co-auteur de Industrie automobile, la croisée des chemins. En effet, Renault est bien mieux positionné sur les marchés émergents que PSA notamment grâce à l'alliance avec Nissan. Mais aussi grâce à ses véhicules low cost qui répondent parfaitement aux besoins de ces pays, comme l'atteste l'expérience brésilienne". Désormais la marque au losange s'y arroge 5,8% de part de marché, devenant ainsi l'un des acteurs clé au Brésil.
A l'inverse PSA qui a initié depuis 2009 sa stratégie de montée en gamme risque de connaître des jours plus difficiles. "Le groupe est confronté à deux problèmes majeurs : son internationalisation un peu tardive, et sa taille. Dans ces conditions faire du haut de gamme à l'image d'un Volkswagen est certes défendable, mais risqué", ajoute le spécialiste. Cela demande en effet d'importants investissements qui risquent à court terme de réduire la profitabilité du groupe. Face à une conjoncture qui s'annonce morose en Europe - le marché a reculé de 1,1% depuis le début de l'année - PSA, qui ne vend que 41% de véhicules hors d'Europe, risque donc de souffrir davantage. Surtout dans un contexte, où les petites voitures à faible marge sont devenues la norme.
Résultat, après avoir résisté des années à la tentation de délocaliser, le groupe dirigé par Philippe Varin semble résigné à quitter progressivement le Vieux Continent pour des pays socialement moins coûteux. Mercredi parallèlement à l'officialisation de ses investissements au Brésil, le groupe a annoncé qu'il pourrait supprimer jusqu'à 6800 exemplaires d'ici à fin 2012 en Europe. Il y a quelques mois encore c'était Carlos Ghosn qui se faisait onvoquer en urgence à l'Elysée pour s'expliquer sur les rumeurs de délocalisation de la Clio IV en Turquie ou sur la fausse affaire d'espionnage. Aujourd'hui il remporte le méga-contrat de la voiture électrique, technologie sur laquelle il a énormément misé, et c'est son homologue Philippe Varin qui devrait être reçu prochainement par Eric Besson. Le vent tourne...(Reuters)