Dans les années 60 et 70, il était plutôt rare pour un conducteur de passer d’une marque à l’autre. La voiture n’était pas seulement un «statut symbole» pur et dur, mais surtout un lien avec une marque avec laquelle on pouvait s’identifier pleinement. Oui à l’époque, chaque marque de voiture était fort différente, un conducteur de Peugeot, n’aurait par exemple jamais imaginé un seul instant passer chez Simca. On entrait quasiment en religion avec sa marque, comme on le faisait aussi avec son parti politique. L’infidélité était fort mal vue, que ce soit par son concessionnaire avec qui l’on avait sympathisé ou avec le patriarche de la famille.
Alors en France, il y avait les Citroënistes…pour eux rouler dans une 404 aurait été un sacrilège, alors je ne vous décris pas la scène de ménage si le dévolu se serait porté sur une R16 TX de la Régie Renault, une marque appartenant à l’Etat français. Le monde était encore en ordre à cette époque et ces deux autres marques françaises ne se déclinent tout simplement pas en iste….Oui il fallait mériter le iste!
Citroen DS 19
En Italie, vous aviez deux clans en plus de Fiat, les Alfistes et les Lancistes. Ces derniers étaient connus pour leur style, leur classe sans jamais la moindre faute de goût, oui il s’agissait de notaires, de patrons de groupes industriels qui roulaient en Aurelia ou Flaminia. Les Alfistes étaient un peu plus m’as-tu vu, peut-être plus sportifs aussi, et ils aimaient un peu moins la discrétion au volant de leur Berlina 1750 ou Giulia. Par contre l’épouse sportive chic aimait conduire une Alfa 2600 Sprint ou un cabriolet de la même lignée avec un foulard Gucci dans les cheveux. Toute une époque…
En Angleterre, inutile de rechercher un quelconque iste…c’est votre accent, votre tailleur qui vient ou non de Saville Row, votre passage à Eton ou à Oxford qui vous classent définitivement sans possibilité d’utiliser une quelconque passerelle, à moins d’être l’épouse blonde d’un footballeur. Vous roulez alors en Bristol, Bentley, Aston ou Rolls, non sacrilège, on ne roule pas en Rolls on se fait conduire avec un chauffeur aux gants blancs qui vous dépose devant votre club de Mayfair.
En Allemagne, les cols bleus roulaient en Opel, un chef d’atelier en Ford de Cologne. Les jeunes qui avaient réussi à rapidement monter l’échelle sociale en BMW et les nantis en Mercedes. Restait les individualistes, ah oui il y a un iste dans ce mot, alors peut être que l’on pouvait parler de Borgwardistes! Par contre, c’est certain, les Porchistes ont toujours existés, encore aujourd’hui, ils forment une communauté puissante (nous ne parlons pas de chevaux…) mais de leur compte en banque. Les vrais Porchistes se doivent de rouler avec un flat6 ou flat4 dans le dos qui ronronne tel un félin toujours prêt à bondir même après avoir parcouru nettement plus de 250 000 kilomètres, c’est encore mieux si il est refroidi par air. Maintenant il y a même des Porchistes d’adoption, tout d’abord ceux qui optent pour un coupé 944 ou 928, et les néo-porschistes qu’on retrouve au volant des Cayenne, Macan ou Panamera.
Porsche 911 2 Litres
N’est donc pas iste qui le veut !
Pierre-Yves Augsburger