L'édition revisitée de la Mobility Night a réuni plus de 150 professionnels le 12 juin à l'Abbaye de Neumünster. Organisée en parallèle du HR Factory, et comprenant plusieurs challenges intitulés "Mobility Labs", cette édition 2018 a vu plusieurs experts locaux et internationaux partager leurs bonnes pratiques et discuter des dernières tendances d'un secteur en pleine transformation. Puis, les Luxembourg Mobility Awards ont été remis aux professionnels locaux ayant convaincu les membres du jury lors de sessions de pitchs.
Avant d'assister aux conférences sur la thématique de la mobilité, les acteurs du secteur ont pu participer à la première édition des Mobility Labs, avec plusieurs challenges proposés par les partenaires de l'événement – LeasePlan, et David Iachetta – avec pour but de brainstormer sur les challenges actuels et ainsi de réinventer la mobilité de demain.
Quelle mobilité en Europe ?
C'est tout d'abord Steven Schoefs, Chief Editor de FleetEurope, qui a présenté à l'audience un panorama des meilleures stratégies de mobilité entreprise en Europe. "La zone Europe est très complexe : beaucoup de données sont disponibles et les cultures diffèrent selon les pays. A titre d'exemple, on recense 265 millions de véhicules particuliers au sein de l'UE, avec 14 millions de nouvelles immatriculations chaque année. Ainsi, il est extrêmement complexe de mener une politique de mobilité commune," a débuté Steven Schoefs. A l'heure actuelle, les véhicules électriques ne représentent qu'1% du parc automobile européen, et la moyenne de CO2 rejeté par les autres véhicules est de 118g/km. Il s'agit là d'un défi majeur pour l'Europe, et de nombreuses villes prennent des mesures afin de limiter les émissions de CO2. "Il y a plus de 200 initiatives qui ont été lancées en Europe dans ce sens, avec en tête l'Angleterre, la Norvège, les Pays-Bas et la France," explique l'expert automobile. Puis, Steven Schoefs a également adressé le changement de mentalité des utilisateurs, qui se posent désormais la question de détenir un véhicule : est-ce encore vraiment d'actualité de contracter un leasing de 4 ans ou doit-on favoriser des contrats sur mesure, "pay-per-use" ? Certaines sociétés décident d'intégrer les services Uber ou BlaBlaCar dans leurs car policies pour faciliter la mobilité de leurs employés, élément différenciant dans un contexte de guerre des talents. Ces intégrations sont suivies de plusieurs interrogations, notamment en termes de sécurité, d'assurance, etc.
Le rédacteur en chef de FleetEurope s'est ensuite intéressé aux tendances du secteur et aux innovations des fournisseurs, constructeurs et startups. "Les fournisseurs traditionnels sont désormais tournés vers l'utilisation. Les nouveaux acteurs proposent des services disruptifs. Les sociétés de leasing se lancent également dans le private lease…," souligne-t-il. L'expert a par la suite listé quelques-unes des bonnes pratiques en termes de mobilité de sociétés innovantes telles que Google (bike sharing, focus sur les transports publics), DiDi (shuttles gratuits) et Facebook (des incentives pour les gens qui résident à moins de 16 km de l'entreprise). Les constructeurs, quant à eux, investissent dans des services de mobilité : BMW s'est offert le leaser Alphabet, Mercedes-Benz travaille sur le car pooling, Peugeot a lancé Free2Move, Fiat propose une flotte CNG à ses employés, etc. "A tous les niveaux, les clients, constructeurs et fournisseurs s'orientent clairement vers la une politique de mobilité plutôt qu'une gestion fleet,"a conclu Steven Schoefs.
Continuer à développer la multi et intermodalité
Steven Schoefs a par la suite modéré une table ronde intitulée "Mobility Champions" à laquelle ont participé Patrice Waltzing (Partner, Finances & Operations Leader, PwC Luxembourg), Guido Savi (Head of Automotive Consultancy, Febiac) et Olivier Klein (Head of Mobility Unit, LISER). Pour Patrice Waltzing, "la mobilité est un élément crucial dans la gestion des RH : il s'agit du problème numéro 1 de nos collaborateurs. Nous nous devons donc de trouver des solutions. Notre vision de la mobilité ? Eviter que les gens se déplacent, et essayer de proposer des solutions d'immobilité tel que le télétravail". Par contre, pour Guido Savi, la voiture reste l'élément central de la mobilité, et réduire les déplacements aurait un impact négatif sur l'économie. Le géographe Olivier Klein travaille quant à lui sur la gestion de la mobilité quotidienne et résidentielle avec pour mission d'appuyer et de faciliter les décisions des autorités locales : "certains frontaliers venant de France mettent 55 minutes par trajet pour se rendre au travail, ce qui peut avoir des conséquences sur leur vie de famille, leurs loisirs. Aujourd'hui, il est important de travailler sur la multimodalité ou l'intermodalité, et donc de combiner les transports". Même son de cloche pour Guido Savi, malgré la difficulté de convaincre les gens à utiliser les transports en commun, la voiture offrant une plus grande flexibilité : elle reste centrale dans la chaine de mobilité, mais les constructeurs investissent effectivement dans de nouvelles solutions de mobilité. "Chez PwC, nous cherchons des alternatives à la voiture personnelle. Les transports en commun devraient s'améliorer avec l'arrivée du tram, et de notre côté nous proposons des solutions de covoiturage, car pooling, vélos électriques, etc," explique Patrice Waltzing. Quant à la voiture autonome, elle pourrait avoir un effet bénéfique selon M. Savi car elle rendrait le trafic plus fluide. Les datas sont donc au cœur de cette mobilité autonome et aussi lorsque l'on aborde le développement des villes intelligentes, sujet sur lequel planche Olivier Klein au LISER, qu'il s'agisse de la gestion des parkings, de la congestion, etc. Les experts ont finalement discuté des péages donnant l'accès à certaines villes en Europe, solution à l'impact immédiat. Pour M. Waltzing, il est désormais important de sortir du fleet pour aller vers un panel de solutions de mobilité. Il pense que l'Etat a un rôle important à jouer dans ce changement de mentalité. "Les initiatives du gouvernement sont cohérentes," ajoute Guide Savi.






Les approches digitales essentielles à la nouvelle mobilité
La session de conférences s'est clôturée avec des interventions mêlant mobilité et technologie. Erwin Coesens (Country Manager, Autorola Belux) a pris la parole, avec une présentation à propos des Smart Data et des bénéfices de leur utilisation. Il a débuté son intervention en présentant l'évolution des motorisations diesel et notamment une baisse au profit des essences, hybrides et électriques (en 2015, le diesel représentait 60% des nouvelles immatriculations, alors qu'aujourd'hui il représente 48%). Il a ensuite orienté sa présentation sur l'utilisation des données permettant d'anticiper et de mesurer en temps réel. Car en effet, la société Autorola est notamment active dans le remarketing de véhicules et se définit comme la nouvelle chaîne sécurisée pour l'achat et la vente de voiture. "Grâce aux Smart Data récoltées par Indicata – société faisant partie du groupe Autorola – nous sommes en mesure de donner des informations en temps réel sur le marché de l'occasion en offrant un Market Days Supply, qui permet d'optimiser la performance et les bénéfices des utilisateurs et entreprises," explique Erwin Coesens.
Enfin, Xavier Dunoyer de Segonzac (Marketing Manager, GAC Technology) a présenté un mix RH / Digital / Fleet optimal pour booster la mobilité. L'éditeur de logiciel de fleet management est présent en Europe et recense actuellement quelques 215 000 véhicules gérés via son application. "Selon le rapport MoDu 2.0, 545 000 véhicules sont sur la route au Luxembourg, mais 250 000 sièges sont libres. En effet, 69% des résidents utilisent leur véhicule. Pour se rendre au travail, la distance moyenne est de 13 km. La voiture est-elle vraiment le moyen de transport le plus adéquat ? L'objectif est une optimisation des moyens de transports permettant donc de réduire la congestion en heure de pointe, d'augmenter le taux d'occupation des véhicules et d'améliorer la sécurité routière et la qualité de l'air," explique le responsable Marketing. Pour Xavier Dunoyer de Segonzac, les DRH disposent de plusieurs outils et notamment de l'auto-partage (mutualisation des véhicules) et du covoiturage (mutualisation des trajets). Ceux-ci ont des bénéfices important : un meilleur engagement des collaborateurs, un renforcement de la marque employeur, une amélioration de la démarche RSE et une baisse des coûts facilities et déplacements. Il a conclu sa présentation en présentant la solution offerte par GAC Technology, un module d’auto-partage et de covoiturage.
L'événement s'est clôturé avec le traditionnel networking cocktail, suivi du diner de gala de la Mobility Night lors duquel ont été remis les Luxembourg Mobility Awards. De plus les vainqueurs des challenges du Mobility Lab ont été annoncés.
Alexandre Keilmann
Photos : Dominique Gaul