Plus faible consommation, prix moins chers à la pompe, moins d’hydrocarbures brûlés, les avantages d’un véhicule à moteur diesel ne manquent pas. Cependant, le "dieselgate" qui frappe actuellement le secteur automobile a fait changer le sens du vent et les véhicules essence remontent dans l’estime des consommateurs. Au point d’observer un retournement de situation ?
18 septembre 2015. Le scandale du "dieselgate" éclate. Une enquête menée par l’EPA, l’agence de protection environnementale américaine, révèle que des dizaines de millions de véhicules seraient concernés par un système de triche à la pollution : un processus automatisé permettant aux véhicules de limiter l’émission de gaz polluants afin de passer sans encombre les tests anti-pollution. Un séisme mondial sans précédent dans le monde de l’automobile qui a incontestablement joué sur l’image des moteurs diesel.
Car malgré cette encornure, le moteur diesel jouit d’une image positive, composée de beaucoup d’avantages par rapport aux moteurs à essence sans plomb. L’avantage principal qui incite un automobiliste à acquérir un véhicule diesel réside dans le fait que celui-ci consomme jusqu’à 20% de moins qu’un véhicule conventionnel. Les prix à la pompe sont également moins élevés à la pompe, et ce dans tous les pays européens. Au Grand-Duché, le diesel est le seul carburant à flirter sous la barre d’un euro par litre. La conséquence d’un avantage fiscal sur l’essence sans plomb : au Luxembourg le droit d’accises sur le diesel est fixé à 335 euros par tranche de 1 000 litres contre 462 euros pour l’essence.
Dès lors, le parc automobile luxembourgeois se retrouve composé majoritairement de véhicules diesel. En 2015, 70% des nouvelles immatriculations concernaient des véhicules diesel, contre 28% pour les véhicules à essence. Une tendance que l’on ne retrouve pas forcément chez les pays voisins.
Quand la dé-diésélisation devient un enjeu politique
C’est une première en 20 ans du côté belge : les ventes de véhicules essence ont dépassé celles des véhicules diesel. De janvier à mai 2017, sur les 254 899 véhicules vendus, 131 161 roulaient à l’essence et 123 738 au diesel. La raison ? Le diesel ne représente plus aucun intérêt financier outre-Quiévrain. La hausse des accises sur le diesel intervenu dès novembre 2015 était l’une des mesures prévues dans le cadre du "tax shift" et la différence de prix entre le diesel et l’essence est revenue à l’équilibre.
En France, la campagne présidentielle s’est emballée dans la continuité du "dieselgate". La plupart des candidats de gauche et du centre ont proposé dans leur programme une sortie progressive du diesel. Sitôt élu, Emmanuel Macron a rappelé dans son programme vouloir aligner la fiscalité du diesel sur celle de l’essence pendant son quinquennat, dans le but de réduire massivement la pollution liée aux particules fines. Ainsi, on a aussi observé en France des volumes de vente plus élevés du côté des véhicules à essence que du côté des diesels en 2017.
Au niveau des chiffres, les tendances sont en train de se croiser. La part des véhicules diesel dans le parc automobile français a fortement diminué depuis 2013, passant de 67% à 48% en juin 2017, soit l’équivalent des véhicules essence, qui eux sont passés de 30 à 47% du parc automobile. L’écart à la pompe n’est plus le même qu’auparavant et il n’est pas garanti pour le propriétaire d’un véhicule diesel de devoir assumer des coûts d’entretien élevés.
Une parenthèse avant une tendance à l’électrique ?
Mais ce retour en grâce constaté dans les différents pays pourrait être contré par l’émergence de nouveaux modèles : les véhicules électriques. Bien qu’elle n’existe que depuis quelques mois, l’offre est déjà très fournie : Renault, Peugeot et Citroën proposent déjà des véhicules électriques sur le marché. Bien que la démocratisation des véhicules électriques, de par une politique de communication et d’accessibilité, n’en soit qu’à ses débuts, certains constructeurs estiment que les véhicules électriques représenteront 10% du marché automobile mondial d’ici 2020.
Les gouvernements suivent d’ailleurs cette émergence de très près : alors que Nicolas Hulot, ministre français de l’environnement, annonçait début juillet la fin des véhicules diesel et essence à l’horizon 2040, le Ministère du Développement Durable et des Infrastructures luxembourgeois a entamé une campagne pro-électrique intitulée "Réforme fiscale pour une mobilité durable". Il faut voir à travers cette réforme une démarche incitative, et non répressive, pour se diriger vers les véhicules écoresponsables. Ainsi, les adeptes des véhicules diesel sont les grands perdants au contraire des propriétaires de véhicules "à zéro émission" qui pourront bénéficier d’un abattement fiscal de 5 000 euros. Aussi, cette réforme permettra l’installation de 800 bornes de charges électriques publiques sur tout le territoire luxembourgeois d’ici 2020 afin de se diriger vers l’électrification des transports.
Une perspective, dès lors, à prendre en compte au sein des constructeurs automobiles. Comme nous le confirmait Alban Joly, responsable des ventes chez Peugeot Rodenbourg, lors d’un récent entretien : "Le changement ne pourra certes pas se faire du jour au lendemain, mais le constructeur qui ne s’orientera pas vers l’électrique aura forcément un temps de retard, donc il faut anticiper ce changement". Au point que les véhicules essence et diesel lâchent prise ?
Benjamin Garnier
Cet article a déjà fait l'objet d'une publication dans BEAST #8 / www.beastmagazine.lu