Un système qui peut sauver des vies La Commission européenne souhaite rendre obligatoire les systèmes d'appel d'urgence dans les voitures neuves. Mais ce service de sécurité reste largement méconnu en Europe. Après plusieurs tonneaux, la voiture termine sa course sur le toit. Sous la violence du choc, le conducteur a perdu connaissance. Aucun témoin n’a assisté à la scène et pourtant, les pompiers se dirigent déjà vers le lieu de l’accident. Ils ont été alertés par la voiture quia composé le numéro d’appel d’urgence... tout en précisant sa localisation. Si tous les véhicules étaient équipés du système d’alerte, baptisé eCall, ce sont 2500 vies qui pourraient être sauvées chaque année en Europe. Ainsi, la Commission européenne a-t-elle adopté une mesure, en septembre dernier, visant à rendre ce système obligatoire sur toutes les voitures neuves commercialisées à partir de 2015.   Trois précurseurs Certains constructeurs n’ont pas attendu cette indication pour développer leurs propres systèmes. Parmi eux, le groupe PSA a lancé son service en 2003. Baptisée Touch chez Citroën et Connect SOS chez Peugeot, il est proposé aujourd’hui sur la majorité des modèles du groupe. En huit ans, «PSA a vendu plus de 900000 voitures en Europe équipées de ce service de secours, dont près de 240000 sur les six premiers mois de l’année 2011», souligne-tondu côté du groupe français. BMW propose un équipement similaire. Lancé en Allemagne en 1999, il est disponible en France depuis 2004. Jean-François Bidard, chef de produit BMW Connected-Drive, estime à «15000 le nombre de voitures de sa marque équipées en France aujourd’hui».Toujours porté sur la sécurité des passagers, Volvo s’est également lancé sur le créneau à l’automne 2004 avec Volvo On Call. Selon le constructeur, 120 voitures équipées sont écoulées en moyenne chaque année dans l’Hexagone. Ford lancera le sien en milieu d’année prochaine, d’abord sur la Focus et sur le monospace C-Max. Baptisé Ford e-Call, ce système appellera automatiquement les urgences (le 112) en cas d’accident, à condition que la voiture et le téléphone du conducteur soient équipés d’une connexion Bluetooth. Pour autant, ces initiatives sont presque exceptionnelles, de nombreuses marques n’ayant toujours pas développé d’offre. La Commission européenne estime à moins de 1% le nombre de voitures équipées d’un système d’appel d’urgence aujourd’hui en Europe. Renault avait lancé un système à la fin des années 90, mais « l’expérimentation n’a pas été concluante car, à l’époque, le réseau téléphonique n’était pas adapté », justifie le constructeur, qui ne prévoit pas de renouveler l’expérience prochainement. Malgré son succès aux États-Unis, le système OnStar, qui équipe de nombreuses marques du groupe General Motors, n’est pas proposé sur les modèles européens des marques Chevrolet et Opel suite à des «problèmes de coordination entre les opérateurs téléphoniques des différents pays européens ». Parmi les constructeurs européens, ni Volkswagen, ni Fiat, ni Jaguar, ni Land Rover, ni même Mercedes n’exploitent un tel système en France. Hormis Nissan, qui le commercialise au Japon, l’offre n’existe chez aucun constructeur asiatique en Europe. Toyota justifie cette absence par «le manque de subordination européenne». Pour rappel, la Commission européenne avait incité volontairement les constructeurs à équiper leurs voitures d’un système d’appel d’urgence pour 2009... Pas un argument de vente Malgré ces disparités entre constructeurs, l’efficacité du système eCall est reconnue. BMW et PSA ont obtenu la certification des pouvoirs publics pour leurs équipements et reçu le prix EuroNCAP Advanced en 2010. Le laboratoire d'accidentologie et de biomécanique effectue, à la demande de PSA, une enquête trimestrielle auprès de clients ayant bénéficié du service suite à un accident. «Ces enquêtes ont permis d'améliorer et de fiabiliser le système, précise un porte-parole du constructeur. Les retours sont en général très positifs et les clients se disent prêts à racheter un véhicule muni de ce système». Depuis le lancement de eTouch et de ConnectSOS en 2003, le groupe PSA a comptabilisé plus de 4400 appels «sérieux», qui ont nécessité l’intervention des secours. BMW, pour sa part, compte « entre cinq et huit appels par mois en France». Pourtant, le système d’appel d’urgence n’est pas un argument de vente. Le groupe PSA tend à le généraliser en le proposant de série sur certains de ses modèles (Peugeot RCZ et Citroën DS5), mais l’eCall reste le plus souvent un service réservé aux versions les plus luxueuses de ses modèles. Seul Peugeot le commercialise en option, pour 290€ (ou 990€ avec le système de navigation) sur certains modèles, en finition de milieu de gamme. Pour Cédric Thiery, agent Peugeot, cela n’est pas suffisant. Il estime que le système devrait équiper de série tous les modèles. «C’est dommage, car cela pourrait devenir un bon argument sécuritaire pour la marque», déclare-t-il. Investissement élevé Le Volvo On Call est facturé 500 € et nécessite un abonnement. Si celui-ci est gratuit pendant deux ans, le client devra ensuite débourser 400 € tous les deux ans afin de s’en offrir les services. Chez BMW également, il faut souscrire un abonnement, gratuit pendant deux ans au maximum, puis payant à hauteur de 189€ par an. Un investissement élevé que la marque allemande tente de justifier : «Notre système d’appel d’urgence fait partie d'un ensemble de services embarqués. Vous pouvez, par exemple, vous informer des actualités, faire un diagnostic de votre voiture à distance en cas de problème, et même faire appel à un service de conciergerie». Plusieurs freins restent donc à lever pour la généralisation des systèmes d’appel d’urgence. Pour accélérer les choses, la Commission européenne souhaite que leur installation ne coûte pas plus de 100€ par voiture et que les appels passent par le numéro européen des urgences (112), ce qui dispenserait les constructeurs de devoir développer leurs propres plateformes d’assistance (comme BMW et PSA). Mais il faudra avant tout travailler à la promotion du système aux yeux du public. Aux États-Unis, le système OnStar de General Motors est mis en avant directement dans certaines publicités du constructeur. Aujourd’hui, il compte plus de six millions d’abonnés. Mais ce déficit d’information du public autour de l’eCall en Europe n’empêche pas les constructeurs d’innover. BMW, par exemple, planche sur une nouvelle version capable de prendre le contrôle du véhicule en cas de malaise du conducteur, de l’arrêter sur le bas-côté et de prévenir les secours via le système d’appel d’urgence.(largus)