C'est à l'Etablissement Namur qu'Automotion organisait ce mardi 27 septembre la 5ème édition de la désormais traditionnelle Fleet Night. Plus de 300 experts du secteur fleet et automobile ont répondu présents, et ont ainsi pu assister aux conférences animés notamment par les présidents des fédérations luxembourgeoises, des startups innovantes, fleet managers expérimentés, mais également par le Ministre du Développement Durable et des Infrastructures, François Bausch. La Fleet Night est également l'occasion de récompenser les meilleures initiatives du secteur avec la remise desLuxembourg Fleet Awards.
"L'automobile connait actuellement une transformation digitale comme de nombreuses industries" a débuté Fabien Amoretti, CEO du groupe Farvest et organisateur de la Fleet Night, avant de saluer la création, la veille, de la House of Automobile au Grand-Duché, "une bonne nouvelle pour le Luxembourg, qui repense les fondamentaux de l'automobile et fait véritablement bouger les choses".
Créer de nouvelles expériences en concession
Introduit par le modérateur Bruno Magal, Manager, KPMG Luxembourg, Olivier Gelas, Directeur Marketing, Ford Belux a débuté son intervention en énumérant quelques tendances qui changent notre société, et donc le monde automobile : "une urbanisation accentuée, le développement de la classe moyenne, le développement du e-commerce, une consommation à la demande et instantanée, etc." Pour M. Gelas, les constructeurs automobiles doivent saisir les nouvelles opportunités qui émergent, notre société passant "d'un monde de possession à un monde de partage". Cependant, le core business de Ford et cette nouvelle mobilité sont indissociables : "il ne peut y avoir de service de mobilité sans bons véhicules". A l'horizon 2030, un cinquième des véhicules seront autonomes, et Ford introduira une voiture de niveau 4, dès 2021. Quant aux concessions, elles restent le premier point de contact avec la marque, et avec une connectivité qui permet de se rapprocher, une nouvelle expérience de vente est cruciale. "Une expérience digitale forte est nécessaire pour créer plus d'émotions" ajoute Olivier Gelas. Ford travaille actuellement sur une nouvelle expérience en concession, qui permet une immersion totale dans la marque : les Fordstores.
C'est ensuite Christophe Grosjean, Managing Director d'ARHS Spikeseed et Project Lead de FleetBack.com, qui a pris la parole devant le parterre de professionnels de l'automobile. "Il est de plus en plus difficile pour les concessionnaires d'atteindre un client. Ils ne décrochent pas, n'ont pas le temps. Cela correspond à une perte de temps et d'efficacité pour les concessions" souligne Christophe Grosjean. En effet, un concessionnaire va appeler en moyenne 5 fois son client, il s'agit presque alors "d'une relation conflictuelle". Les gens ont changé leurs modes d'interaction, utilisent les réseaux sociaux, leurs mobiles. "L'objectif de Fleeback est d'améliorer l'expérience client mais également l'efficacité des employés qui travaillent en concession" précise le project manager. Plus concrètement, le technicien prend une vidéo du véhicule, explique et propose les travaux. Le mode de communication est asynchrone, le client consulte le message ou il veut, quand il veut. Comme le souligne Christophe Grosjean, "les yeux du clients sont dans l'atelier".
Virage digital et chaine de mobilité intégrée
Est ensuite venu le temps de la table des présidents des fédérations automobiles, lors de laquelle Gerry Wagner (Président, mobiz), Guido Savi (Febiac Advisor Luxembourg, Febiac), Philippe Mersch (Président, Fegarlux), Ernest Pirsch (Coordinateur, House of Automobile) et Ed Goedert (Président, Adal) ont échangé sur des sujets tels que la création de la HOA et sur ses missions, ou encore sur les nouveaux concepts de mobilité ainsi que sur les défis qu'ils posent. Comme l'a rappelé Ernest Pirsch, la HOA représente 100% du marché automobile. Cette collaboration entre les fédérations n'est cependant pas nouvelle : elles avaient notamment travaillé sur des dossiers tels que la fiscalité des véhicules de société.
Le président de la mobiz (anciennement FLLV), Gerry Wagner a rappelé que la population du Grand-Duché allait s'accroitre fortement dans les années à venir, engendrant ainsi de nouveaux défis, notamment de mobilité. "Au début nous financions des véhicules de société, mais désormais, nous offrons des services complémentaires et nous nous dirigeons vers des services autour de la mobilité".
Pour Guido Savi, Luxembourg Advisor pour la Febiac, la connectivité, et la conduite autonome vont révolutionner de nombreux business autour de l'automobile, et notamment l'assurance. La prochaine étape pour la House of Automobile ? Créer des groupes de travail afin d'étudier ces futurs défis et être prêts à leur arrivée prochaine.
"Les concessionnaires qui vendent des véhicules de la même manière qu'il y a 5 ou 10 ans doivent réagir" a débuté Ed Goedert, le président de l'ADAL, qui a souligné le fait que les clients achètent désormais différemment. Les concessions ont pourtant un avantage majeur : 95% des acheteurs automobiles sont leurs clients. Philippe Mersch, le président de la Fégarlux ne peut que confirmer : "le challenge ne sera que plus grand pour les petites et moyennes concessions. Nous devons réussir le virage de la digitalisation et vraiment nous y investir". Pour Philippe Mersch, les rôles des mécaniciens, conseilleurs de services et des vendeurs vont changer, et les concessions doivent réagir dès aujourd'hui.


La mobilité, l'un des défis principaux pour le Ministre Bausch
Les participants à la Fleet Night ont ensuite pu assister au discours de François Bausch, Ministre du Développement durable et des Infrastructures. Passionné par la mobilité depuis des années, le Ministre Bausch a rassuré l'audience : "il ne faut pas avoir peur de la révolution qui touche le secteur de la mobilité". Les gens se posent désormais les bonnes questions : de quelle voiture ai-je besoin pour quelles activités ? Pour François Bausch, l'ownership et le usership vont basculer dans les années à venir, car, lui qui a visité les infrastructures des major players à la Silicon Valley, pense que la mobilité autonome va encore changer les mentalités.
Déjà promise en 2011, les infrastructures de recharge de véhicules électriques arriveront au Grand-Duché dès mars 2017. 800 points, soient 1600 prises de recharge vont permettre une plus grande accessibilité et une meilleure visibilité pour la mobilité électrique? Le Ministre souligne qu'en Norvège, 28% des véhicules sont des véhicules propres et que pour augmenter la part de ces véhicules au Luxembourg, des incitations financières vont également être mises en place. La réforme fiscale de 2017 prévoit ainsi un abattement fiscal de 5000 euros pour les véhicules particuliers à zéro émission.
Pour les véhicules de société, une modification de l'avantage en nature forfaitaire en fonction des émissions en CO2 va entrer en vigueur, avec une pénalisation des voitures à Diesel, de 0,2 point, par rapport aux motorisations à essence. Les véhicules ayant des émissions supérieures à 150g de CO2/km seront également pénalisés. Après la réforme des taxis et un demande de licences 0 émission en forte augmentation, le Ministère va clairement dans la direction de la décarbonisation de la voiture. "Tous ces éléments vont nous permettre de tenir le cap donné lors la COP21" a souligné François Bausch. Le Ministre a également avoué que des discussions étaient en cours afin de faire du Grand-Duché un des pays pilotes pour la voiture autonome…
Du TCO au TCM
Pour Virginie Chassard, Product Manager, Corporate Vehicle Observatory, le diesel est actuellement diabolisé, et cela dépend des gouvernements au pouvoir. L'exemple de la Suède, qui était un pays qui utilisait historiquement de l'essence, puis qui est passé au diesel, revient actuellement sur ses positions. "Car, restons logiques et lucides, toutes les nouvelles énergies n'auront pas la même destinée, selon le pays" souligne Virginie Chassard. Au Grand-Duché, elle pense notamment que les trois motorisations qui ont le plus d'avenir sont l'hybride, le plug-in hybride et enfin l'électrique. "C'est le conducteur qui rend le véhicule plus polluant qu'il ne l'est à la base". Et si depuis des années on regarde le TCO, c'est bien le TCM qui importe : "les coûts varient en fonction de la personne qui est derrière le volant" précise la Product Manager. Elle cite également la télématique comme outil permettant de mesurer l'utilisation du carburant, si la conduite est appropriée, etc. Il permettra donc d'optimiser l'utilisation des véhicules, en responsabilisant les conducteurs.
Nico Bemtgen est le Directeur Administratif de la fondation Stëftung Hëllef Doheem. Ce service ambulatoire nécessite une mobilité garantie 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Il a également abordé le TCM et pense que le futur "Mobility Manager ne devra plus seulement raisonner en termes de véhicules, mais mettra le cap sur la rationalisation des déplacements, sur les nouvelles technologies, ainsi que sur les attitudes et comportements des conducteurs". Pour Nico Bemtgen, un collaborateur utilisera différents véhicules, et un véhicule sera utilisé par plusieurs personnes. Ceci nécessitera alors une collaboration entre les différents acteurs de la mobilité : entreprises, conducteurs, loueurs et concessionnaires. "Le fleet manager est désormais un visionnaire pragmatique qui met l'homme et ses besoins au centre de la mobilité" a conclu le Directeur Administratif.
Car Policies : entre maîtrise des coûts et flexibilité
Le Directeur Achats de la société Carlsberg, Bart Borloo a quant à lui exposé un cas pratique de gestion de flotte, avec une approche Achats. Chez Carlsberg, deux points étaient clés dans la définition de la stratégie fleet : la responsabilité sociale de l'entreprise et le TCO. Bart Borloo distingue également les ECU (Expected Cost of Use) et RCU (Real Cost of Use). Si certains coûts sont fixes (contrats avec le leaser) d'autres ne peuvent être prévus. Il s'agit notamment des sinistres, des amendes, etc, qui ne sont pas liés au contrat. Il y a un an, Bart Borloo n'était pas satisfait des résultats et souhaitait réaliser des économies en externe tout comme en interne. Il a alors approché les fournisseurs en toute transparence pour n'opter finalement que pour un seul leaser. Ensemble ils ont mis un place un Helpdesk et Service Level Agreement, facilitant ainsi la tâche administrative du fleet manager, dont le rôle est devenu bien plus tactique. Sur 4 ans, l'économie potentielle s'élève à 75 000 euros. Il peut désormais mieux maîtriser les coûts supplémentaires et limite les dépassements de budget.
Fabrizio Dony, Head of HR People Reward à la Banque Internationale à Luxembourg, s'est ensuite exprimé sur la mise en place de la politique fleet, en 2000. Celle-ci a été décidée en 6 mois et a été développée sur des axes principaux et une approche KISS (Keep It Simple & Smart). La flexibilité est un de ces axes, seules les marques ostentatoires sont refusées, plusieurs types de leasings sont possibles. Des abonnements de trains sont également disponibles : en bref, on donne une prime à l'employé et il en fait ce qu'il veut. Les RH définissent un cadre, l'employé roule et dépense son budget. Côté responsabilité, une limite de 180g de CO2 par km a été instaurée. Il existe également une flexibilité autour de la carte essence, qui est finalement une carte crédit, facile à délivrer pour une banque comme la BIL, et qui peut même servir pour les péages sur autoroutes. "Si le rôle du Fleet Manager doit évoluer, cela dépendra principalement du type de service que l'employeur met en place, mais également de la volonté du loueur de se substituer à l'employeur" a ajouté Fabrizio Dony.
Le dernier speaker de cette 5ème Fleet Night ne fut autre qu'Ahmed Mhiri, fondateur et CEO de TravelCar, dont la société venait de remporter le prix de Fleet Start-up of the Year. "Il ne s'agit pas d'une innovation extraordinaire, mais simplement de mieux utiliser les ressources dont nous disposons déjà" souligne Ahmed Mhiri. Son avantage ? TravelCar n'est pas un pure player comme Airbnb ou Blablacar, il y a un véritable tiers de confiance : "c'est une solution hybride". Les utilisateurs déposent leurs voitures, ils sont assurée à la MAIF, ne paient pas le parking et d'autres ont la possibilité de le louer pour un tarif moins élevé. Présent dans 130 aéroports et avec plus de 250 000 clients en moins de 4 ans, TravelCar se situe entre les mondes peer-to-peer et traditionnel avec un vrai service. Le marché actuel de l'économie collaborative représente 30 milliards de dollars et va être multiplié par 8 dans les 10 prochaines années. "Tous les acteurs doivent prendre part à cette création de valeur" a conclu Ahmed Mhiri.
Automotion souhaite remercier tous les intervenants et participants à la Fleet Night, ainsi que tous les partenaires de l'événement, et vous donne d'ores-et-déjà rendez-vous pour la première édition de la Mobility Night, le 10 novembre prochain, à l'Etablissement Namur.
Alexandre Keilmann
Photos: Domiique Gaul