Heureusement que Sebastian Vettel était là. La victoire du jeune Allemand à Abou Dhabi (Emirats arabes unis), sacré plus jeune champion du monde de formule 1, à 23 ans, a offert aux fans une fin de saison triomphale. Le succès a dopé les chiffres d'audience de la F1 sur la chaîne RTL, qui a renoué avec les hauteurs de 2006, quand l'Allemagne suivait avec passion les exploits de son autre champion d'alors, Michael Schumacher. Par un tour de passe-passe, Sebastian Vettel a remplacé Schumacher dans le cœur des fans. Surtout, il les a consolés des déboires actuels de leur ex-idole sur les circuits… Schumacher le grand n'est plus, vive Vettel, en quelque sorte.
Car Schumacher le septuple champion du monde, Schumacher le mythe vivant, parti dans la gloire en 2006 et revenu dans la course en 2010, n'a pas foulé une seule fois les marches d'un podium cette saison. Il termine 9e au classement général, cerné par des jeunes aux dents longues, qui regardent le géant déchu avec consternation. L'échec du come-back est d'autant plus amer qu'il avait été célébré en grande pompe par Mercedes en début d'année.
ARRÊTER LES FRAIS
L'opération de communication était parfaite : Mercedes le constructeur du bolide mythique "Flèche d'argent" (Silberpfeil) revient dans la F1 en son nom propre (hors la coopération avec Mc Laren) après cinquante-cinq ans d'absence, avec au volant le roi de la F1. Le budget est monumental (200 millions d'euros), les gages de l'ex-champion frisent l'indécence (estimés à 7 millions d'euros par an). Le bilan des courses a des airs de gouffre financier, à la fois pour Mercedes et pour la "marque" Schumacher elle-même.
Certains fans se montrent compréhensifs et accordent au pilote le temps de se faire à sa nouvelle écurie. "Ce n'est pas le Schumacher que nous connaissons", juge l'ancien pilote Marc Surer, expert pour le site Motorsport-total.com, qui estime qu'il ne peut rester sur un échec. La presse générale est moins tendre. Le Sueddeutsche Zeitung évoque "le triste comeback de Schumacher", le Financial Times parle de "Schumacher le dégrisé", Der Western d'une "déception pure et simple". Le porte-parole d'Angela Merkel lui-même,Stefan Seibert, parlant "en son nom", a souhaité à Vettel " de ne pas, comme Michael Schumacher, succomber un jour à la tentation de revenir une fois les succès accumulés". Quant à son ancien rival Mika Hakkinen, il lui conseille carrément d'arrêter les frais…
"JE PEUX ENCORE M'AMÉLIORER"
Peut-on pour autant parler de la fin de l'ère Schumacher ? Si l'homme n'est plus sur les podiums, il reste un expert pour son écurie et son exemple de champion continue de faire école. Son plus grand fan est d'ailleurs… Sebastian Vettel lui-même, qui ne manque pas une occasion de rappeler combien le génial pilote allemand a influencé sa vocation. Longtemps, Vettel a aimé qu'on le surnomme "Baby Schumi". La photo qui le montre, enfant, posant aux côtés de son idole a été largement commentée depuis dimanche, chacun y allant de sa comparaison et de son pronostic. A 23 ans, alors qu'il a déjà réalisé son rêve de devenir champion du monde, il ne reste plus à Vettel… qu'à battre le record de Schumacher !
Par ailleurs, l'Allemagne ne manque pas de jeunes talents prometteurs, qui tous ont débuté leur carrière alors que Schumacher était en pleine gloire. Outre Sebastian Vettel, l'"écurie" noir-rouge-or a placé cette saison pas moins de cinq pilotes dans les 25 premiers du classement :Nico Hülkenberg (23 ans) chez Williams, Timo Glock (28 ans) chez Virgin, Adrian Sutil (27 ans) chez Force India et surtout Nico Rosberg (25 ans) chez Mercedes, qui termine 4e à Abou Dhabi et a régulièrement dominé Schumacher tout au long de la saison.