L'innovation collaborative pour repenser la mobilité

L'innovation au service de la mobilité du futur

Le premier intervenant, Patrick Vautier, Directeur Marketing & Innovation, RATP Dev représentait lors de cet événement les transports publics. Il débute: "Lorsqu'on pense une ville, on ne commence pas forcément en y intégrant les transports publics, cette problématique n'arrive que des années après". Or, la mobilité est désormais un élément clé pour améliorer la qualité de vie des habitants des villes de plus en plus congestionnées. C'est aussi un élément clé pour le développement économique d'une ville. Par exemple, seules les villes qui ont un réseau de mobilité digne de ce nom peuvent accueillir des grosses compétitions sportives telles que les JO. RATP Dev aide notamment des villes à intégrer de nouveaux systèmes de transports publics et pilote actuellement un projet en Arabie Saoudite : "Notre but est de convaincre les gens de prendre le métro ou le bus dans un pays où le plein d'essence revient à 5 euros…Il faut les convaincre que cela rendra les villes plus fluides et réduira le nombre de morts suite aux accidents de la route". Le pays, qui compte (seulement) 27 millions d'habitants, arrive 4ème en nombre de morts sur les routes. Ce challenge est énorme : "Les gens se réfèrent toujours encore à leur automobile, qui, c'est vrai, à souvent les meilleurs atouts: flexibilité, liberté, etc". Cependant, si de nouvelles alternatives ne sont pas développées, le trafic urbain va augmenter de 60% en 2025…

Comme le rappelle Patrick Vautier, l'idée est de mixer les usages pour arriver à un mode plus équilibré, qui fait que la qualité de vie des citoyens ne se dégrade pas, et que l'environnement soit respecté. RATP Dev s'intéresse alors à six secteurs : le nouveau concept de covoiturage urbain (notamment avec la startup Wayzup), les mini vans 2.0 (une ligne de transport devient virtuelle et flexible, le système est construit entre les utilisateurs eux-mêmes), la mobilité autonome qui verra de nouveaux services arriver à bords des véhicules, aux applications multimodales qui proposent directement plusieurs alternatives pour rejoindre sa destination, la silver economy afin d'être plus respectueux des attentes des personnes en matière d'ergonomie et capacités physiques, et enfin le data management pour offrir la mobilité dont nous rêvons tous. Pour cela, RATP Dev s'entoure de nombreux partenaires en repérant les startups et en leur apportant sa connaissance marché et sa capacité de se déployer plus rapidement. Sur les secteurs plus matures, Patrick Vautier rappelle la nécessité de travailler de manière unie et de créer de véritables écosystèmes.

Uber et sa vision de la mobilité urbaine

Pour la première fois au Luxembourg, la société Uber qui bouscule le secteur de la mobilité depuis maintenant plusieurs années, intervenait lors d'un événement professionnel. Sylvain Andrieu, National Partnerships Lead, est tout d'abord revenu sur l'historique de la société…qui a débuté à Paris, lorsque ses fondateurs ne trouvaient pas de taxis. De retour à San Francisco, ils développent une application simple qui permet aux utilisateurs de se déplacer de manière sure, fiable et économique. Aujourd'hui présent dans plus de 70 pays dans le monde, Uber veut "contribuer à la nouvelle ère de la mobilité" comme le souligne Sylvain Andrieu. Dans 200 villes aux quatre coins du monde, les chauffeurs ont déjà effectué plus de 2 milliards de trajets. La société a un véritable agenda, au-delà d'offrir des services de mobilité à ses utilisateurs : la vision à long terme est d'éviter la congestion et de réduire la pollution dans les villes, des challenges auxquelles de nombreuses mégapoles font face.

A l'heure actuelle, on dénombre plus d'1 milliard de véhicules dans le monde, dont 20% aux Etats-Unis, mais ceux-ci ne sont utilisée que 4% du temps. A Paris, les conducteurs passent 30% de leur temps au volant à chercher un stationnement, et la congestion coute 1% du PIB de l'Europe, ce qui correspond à une perte de 100 milliards par an. Autres chiffre partagé par Sylvain Andrieu : les véhicules sont responsables de 12% des émissions de CO2. En analysant les trajets des courses Uber, on remarque également que le service est un complément des transports publics. En effet, beaucoup de personnes se rendent, ou partent de bouches de métro. La société de VTC mise également sur le casharing, avec sa solution UberPOOL déployée notamment à San Francisco, Londres et Paris. Cela permet à deux passagers qui vont dans la même direction de partager le service : la course est plus longue pour le conducteur, moins de véhicules circulent. "Si tous les trajets étaient partagés, nous n'aurions besoin que de 10% des véhicules actuels, et on observerait une économie de 511 millions de km" souligne Sylvain Andrieu, qui a conclu son intervention de la sorte : "La vision d'Uber est d'avoir moins de véhicules sur la route : moins de voitures individuelles qui prennent beaucoup d'espace et congestionnent les villes. La ville de demain aura des rues plus libérées, et uniquement des voitures qui se déplacent et non stationnées". Quant à l'arrivée d'Uber au Grand-Duché, des discussions sont en cours…

Les enjeux de la mobilité au Grand-Duché de Luxembourg

Patrice Waltzing, Partner, Finances & Operations Leader, PwC Luxembourg, a anticipé les problématiques de mobilité que le Luxembourg connaitra dans les années à venir, en soulignant notamment que même si PwC accueillait 800 nouvelles recrues par an, certains quittaient la société à cause des moyens de transports saturés et du manque d'alternatives. Au Grand-Duché, l'emploi frontalier augmente plus rapidement que l'emploi résident, ce qui cause inévitablement des problèmes et il sera alors difficile d'atteindre les objectifs de mobilité douche du MoDu visant notamment à avoir 25% de mobilité de douce. "Sachant que très peu de frontaliers utiliseront la mobilité douce pour se déplacer, il faudrait que 45% de la population résidente utilise cette mobilité pour se rendre au travail en 2020" souligne Patrice Waltzing. La voiture individuelle reste à considérer, mais pour M. Waltzing, il faudrait également créer de hubs périphériques aux frontières, voire des espaces de coworking ou de bureau… "Nous proposons à nos collaborateurs un panel de solutions de mobilité variées, qui permettent de répondre à leurs besoins et à nos exigences environnementales", avec pour objectif de réduire les déplacements, favoriser l'usage des transports en commun et du covoiturage et également de réduire de nombre de véhicules de société de l'impact de CO2. Les employés de la société PwC ont ainsi accès, en plus de l'application Mobiliteit, à PwC Carpooloing qui permet de matcher des covoitureurs en fonction de leurs adresses et heures de travail, ou encore à Carsharing SwopCar pour des réservations privées ou professionnelles. "La solution pour le futur est une application qui intègre toutes les formules de déplacement" a conclu Patrice Waltzing.

Les organisateurs ont ensuite accueilli Robert Leven, Echevin de la Commune d'Hesperange pour évoquer les problématiques et solutions mises en place par sa commune. "Le plus important pour nous est la qualité de vie des habitants ainsi que la réduction des énergies fossiles car nous participons au pacte climat" ajoute Robert Leven. Situé au Sud-est de Luxembourg, le flux est énorme en heures de pointe, et le trafic est en grande partie causé non pas par les 15 000 habitants de la commune, mais bien par les personnes qui viennent du sud pour rejoindre Howald et Luxembourg Ville notamment. Mais pour que les gens y trouvent un avantage, il faut leur donner la possibilité d'utiliser une autre mobilité : "Nous devons trouver un autre équilibre, et non pas une seule solution, mais bien en ensemble de solutions alternatives". Robert Leven et la commune mettent déjà la mobilité douce en avant avec Le Pedibus, la journée de mobilité chaque septembre, mais également les initiatives "Tour du Duerf", "Mam Velo op d'Schaff", une connexion Véloh avec la Ville de Luxembourg, et les solutions e-bike et e-car sharing de City Mov. Le tram devrait également aider à fluidifier le trafic, tout comme la nouvelle gare CFL de Howald ainsi que le contournement d'Hesperange via la future N3-Sud…

De nouvelles initiatives locales

C'est ensuite Cyrille Horper, Responsable Communication de la société ProCab, qui est intervenu pour présenter son concept de taxis B2B. "Et si votre flotte était un taxi?" a alors lancé M. Horper, car aujourd'hui, le besoin ne réside plus dans le fait de posséder un véhicule, mais bien d'être mobile. Ce besoin quotidien est mis à mal avec la congestion du trafic et la recherche de plus en plus difficile de places de parking. De plus, les sociétés essaient de trouver la meilleur la rentabilité de leurs véhicules de service et de leur flotte. Créée en 2015, la société ProCab s'appuie sur une expérience de plus de 30 ans grâce aux sociétés Benelux Taxis et Intertaxis: toute société peut souscrire à un abonnement gratuit, créer un nombre de comptes illimité et a ainsi accès à plus de 100 véhicules répartis sur deux flottes : Berlines d’une part, Webtaxi d’autre part. Le paiement se fait directement via le compte de l'entreprise, et l'utilisateur peut réserver son taxi via les applications iOS et Android (simples et ergonomiques, elles seront upgradées en début d'année 2017), via le site web www.procab.lu ou en appellant le Call Center au numéro 28 108.

"Nous sommes tous conscients des problèmes de mobilité du pays, avec ses impacts sur environnement et bien sûr l'aspect humain" a débuté Pierre-Yves Meert, Marketing and Innovation Manager, ALD Automotive Luxembourg. Entre 2015 et 2025, le nombre de frontaliers aura augmenté de 25%, et 66% de la population vivra en zone urbaine en 2050. En Europe, le Luxembourg est actuellement le 4ème pays le plus embouteillé, avec 33 heures par personne et par an passées dans les bouchons. La génération Y accorde moins d'importance à la possession et donc aux véhicules de société : "êtes-vous prêts à répondre aux besoins de la génération Y dans votre package mobilité ?". Comme le rappelle Pierre-Yves Meert, les sociétés vont devoir changer les avantages qu'ils offrent aux employés, car mettre un maximum de véhicules sur la route ne fonctionne plus. ALD Automotive propose ainsi de centraliser ces différents services de mobilité, et lance Freedom in Mobility. "Les utilisateurs connaissent leurs besoins en mobilité et on ne peut désormais plus avoir une approche standardisée" souligne M. Meert qui ajoute : "Donnez-leur un budget, et laissez-les gérer". Avec cette solution, l'employé répartit son budget selon ses besoins : il peut avoir accès à une voiture de société, à Switch (possibilité de changer de véhicule), aux vélos, aux transports en commun, taxis, etc, et peut même augmenter son salaire… "C'est ensemble que nous obtiendrons la solution finale : il s'agit d'innovation collaborative ! Il s'agit plus d'un changement de comportement qu'un changement technologique et il est temps que nous nous en rendions compte" souligne Pierre-Yves Meert.

L'événement s'est conclu avec l'intervention de Jean-Luc Corti de l'association ELA, qui a présenté les missions de l'association : aider et soutenir les familles, financer la recherche médicale et informer les professionnels de la santé, mais également sensibiliser l'opinion publique. Cela passe notamment par l'organisation de "Mets tes baskets dans l'entreprise", un véritable exemple de mobilité solidaire ! Le concept et simple : 1 pas = 1 centime d'euro. La première édition luxembourgeoise, en juin 2016, avait permis de récolter plus de 70 000 euros. Participez-y l'an prochain !

Merci aux sponsors de l'événement : ALD Automotive, Autodis, Autofactoria, Etbliassement Namur, Freeedrive, Garage Chelcq, Garages Petry, Procab, smart, Tesla, Total.

Alexandre Keilmann

Crédits photos: Dominique Gaul